EIM 2013 / VITRINE SONORE
La Vitrine Sonore est un dispositif permanent de projection sonore qui longe la façade de Sporobole, le long du trottoir de la rue Albert. Constituée de 16 haut-parleurs, elle permet un contact direct avec les passants qui, de la rue principale du centre-ville de Sherbrooke – la rue Wellington – se rendent au stationnement à étages voisin de Sporobole. La disposition linéique des 16 haut-parleurs et la position de la Vitrine Sonore à l’interface géométrique entre Sporobole et la voie publique font de cette nouvelle galerie sonore extérieure une plateforme singulière de spatialisation et de projection sonore d’oeuvres en arts audio. Elle autorise des approches de compositions sonores spatiales fixes ou en mouvement; elle offre, d’un côté, un point d’écoute de proximité alors que les passants sont exposés à un ou quelques haut-parleurs et elle peut, d’un autre côté, fournir un point d’écoute global à partir de la rue. Pour Sporobole, c’est une occasion d’investir, par un moyen invisible, le domaine public et son environnement immédiat.
MOT DU COMMISSAIRE ET FONDATEUR DE LA VITRINE SONORE /
PHILIPPE-AUBERT GAUTHIER / Arts sonores et espace public / Canada /
De la maison à la rue, du « ghetto blaster » aux écouteurs, des supports matériels aux ondes radiophoniques qui traversent l’éther, et même des téléphones filaires aux portables omniprésents, les pratiques et cultures auditives individuelles ou collectives sont complexes et intriquées. À la fois produites et construites par les utilisateurs et les techniques – mais aussi par la rencontre des deux – les distinctions entre proximité et distance, et intimité et collectivité furent longtemps associées à des séparateurs physiques de l’espace : murs, portes, fenêtres et architecture.
Or, de la maison à la rue, nous habitons maintenant la trace des transitions des baladeurs aux téléphones portables, remaniement certain des communautés et arènes auditives. Construction symbolique de la maison et de l’intimité : les médias sonores y participent sur le site avec systèmes de son et lecteurs CD, mais le statut de l’intimité sonore reste chargé d’ambiguïté via une forme de privatisation mobile. Quelle est la place de la médiation sonore, de l’audition et de l’oralité dans cette refonte et ce franchissement des lignes, limites et séparations, si encore elles existent?
Pour cette édition d’Espace [IM] Média, des artistes sonores se pencheront sur ces idées. Deux artistes dont les pratiques des arts sonores dans les domaines publics sont célébrées sont invités : Gordon Monahan (Canada) et Brandon Labelle (Allemagne), ce dernier étant aussi connu pour ses écrits. Au sujet du franchissement des espaces, de la proximité et de la privatisation mobile – non sans rappeler certains modes de présentation des premières éditions d’Espace [IM] Média – cette édition inaugure un dispositif unique de présentation d’oeuvres sonores : la Vitrine Sonore. Fine ligne de 16 haut-parleurs qui dessinent la frontière architecturale entre Sporobole et la voie publique, cette Vitrine Sonore, qui surplombe le trottoir, offre une expérience singulière d’écoute, mais aussi de création. Les artistes Chantal Dumas (Canada), Erin Gee (Canada) et Anna Raïmondo (Italie) auront l’occasion, tour à tour, d’aborder en résidence de production cette nouvelle plateforme de projection sonore spatialisée dans l’espace urbain.
— Philippe-Aubert Gauthier
Artiste sonore, P.-A. Gauthier est aussi ingénieur mécanique junior, maître ès sciences, docteur en génie mécanique et chercheur à l’Université de Sherbrooke. Ses recherches portent sur l’acoustique et la reproduction spatiale du son. Depuis 1998, P.-A. Gauthier développe une pratique en arts sonores et médiatiques. Les travaux de l’artiste se sont révélés sous plusieurs formes : oeuvres pour support fixe, compositions génératives, installations et spatialisations sonores, performances et musiques.
CHANTAL DUMAS – 86400 SECONDES / Arts sonores et espace public / Canada /
31 juillet au 23 août / Vitrine Sonore / 24 h / 24
Artiste sonore, Chantal Dumas explore le médium du son à travers l’installation sonore, la fiction radiophonique et l’électroacoustique. Adepte du field recording, elle construit ses oeuvres à partir et autour de sons trouvés. Son travail s’écoute comme une traversée des espaces mental, physique, architectural, urbain, naturel ou culturel. Avec ses 86 400 secondes, Sporobole devient un repère temporel. Gigantesque horloge à la fois métaphore du temps, elle nous fait entendre l’écoulement du temps à travers des événements sonores qui ramènent à l’état « conscient », c’est-à-dire au premier plan de l’écoute, ce qui, d’un point de vue sonore, matérialise la mesure du temps.
ANNA RAÏMONDO – IN BETWEEN / Arts sonores et espace public / Italie/
24 août au 11 septembre / Vitrine Sonore / 24 h / 24
Ce projet de recherche sur les espaces acoustiques intermédiaires explore la relation entre le privé et le public. Que se passe-t-il quand on rend invisibles les surfaces et qu’on les convertit en sons provenant des endroits liminaires que sont les portes et les fenêtres? J’enregistrerai, à l’aide de différents microphones et techniques, les sons reconnaissables et abstraits émis par les portes et les fenêtres de Sporobole. J’en ferai une composition, dans laquelle interviendra le silence, afin de créer un espace acoustique habité simultanément par les concepts de public et de privé. Anna Raïmondo est une artiste et une commissaire d’exposition italienne. Son travail se situe entre l’art sonore et l’art radiophonique, entre la performance et l’intervention dans l’espace public ; axé principalement sur la voix et les langages, il témoigne d’un intérêt pour les procédés de traduction et les zones de passage.
ERIN GEE – 7 NIGHTS OF UNSPEAKABLE TRUTH / Arts sonores et espace public / Canada /
12 septembre au 20 octobre / Vitrine Sonore / 24 h / 24
Longue composition, 7 Nights of Unspeakable Truth est construite à partir de la documentation recueillie par Erin Gee au fil de ses recherches nocturnes pour trouver sur les ondes courtes des émissions radiophoniques diffusées par des stations de nombres. Devant le centre Sporobole, dans le cadre de la Vitrine sonore, on pourra déambuler à travers sept soirées d’émissions d’ondes courtes, disposées en ordre du premier au septième jour et synchronisées en fonction de leur heure de diffusion originale. Cette spatialisation de chacune des nuits d’enregistrement permettra aux auditeurs d’apprécier les motifs révélés par les recherches de l’artiste qui a consulté différentes communautés virtuelles afin de parvenir à syntoniser des émissions radiophoniques mystérieuses et inexpliquées diffusant exclusivement des nombres, des tonalités et des codes.